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Pater Laurentius Blog Homélies et digressions d'un prêtre catholique français sur l'Eglise, la géopolitique, la Russie et quelques autres marottes.

Homélie pour la solennité de la Sainte Trinité - Année C - 12 juin 2022

Pater Laurentius

Le mystère de la Trinité

 

Nous venons d’achever le temps pascal avec la célébration dimanche dernier de la solennité de la Pentecôte. Le temps liturgique de Pâques se déploie entre les deux grands pôles que sont la fête de Pâques, où l’Eglise célèbre la résurrection du Christ, et la Pentecôte, où nous fêtons l’Esprit Saint descendant sur les Apôtres. Ainsi, nous avons été conduits à fixer notre regard successivement sur les deux Personnes du Fils et de l’Esprit Saint.

Et voilà qu’aujourd’hui, l’Eglise nous invite à envisager les Personnes divines non plus dans leur distinction, mais dans leur unité : le Père, le Fils et l’Esprit Saint unis ensemble dans la Sainte Trinité.

Peut-être, pour beaucoup d’entre nous, cette fête de la Trinité reste-t-elle bien abstraite et mystérieuse. Les plus anciens se souviennent sans doute de ce que l’on enseignait au catéchisme il n’y a pas si longtemps à propos de la Trinité : « c’est un mystère ». En effet, indéniablement, c’est un mystère. Et puisqu’un mystère nous dépasse toujours, nous pourrions nous dire qu’il nous faut le prendre tel quel sans trop nous poser de questions ; que la Trinité appartient au « monde d’En-Haut » et qu’il ne concerne pas vraiment le « monde d’en-bas » dans lequel nous sommes.

Or ce que cette fête de la Sainte Trinité, une semaine après la Pentecôte, vient nous rappeler, c’est que ce mystère de la Trinité concerne précisément de manière très concrète notre monde « d’en-bas ».

D’abord parce qu’elle concerne la manière dont Dieu agit envers nous. Nous sommes après la Pentecôte ; l’Esprit Saint a été répandu sur l’Eglise. Maintenant, il va se déployer.

Lorsqu’il agit dans le monde et envers nous, Dieu agit toujours dans l’unité des trois Personnes divines. Dans son rapport avec nous, l’unité de la Trinité prime toujours sur la distinction des Personnes. C’est d’abord Dieu Trinité – Père, Fils et Saint Esprit – auquel nous avons à faire dans le concret de notre existence, dans le concret de l’histoire du monde et dans le concret de l’Eglise.

Si le temps pascal s’articule autour des deux Personnes divines du Fils éternel incarné et de l’Esprit Saint, le temps que l’on dit « ordinaire » est d’abord celui de l’œuvre extraordinairement « ordinaire » de Dieu dans le monde et dans nos vies, et cette œuvre est celle de la Sainte Trinité. C’est d’abord l’œuvre créatrice de la Sagesse divine, comme le rappelle le livre des Proverbes : « Quand le Seigneur établissait les cieux, j’étais là, dit la Sagesse, quand il traçait l’horizon à la surface de l’abîme, qu’il amassait les nuages dans les hauteurs et maîtrisait les sources de l’abîme, quand il imposait à la mer ses limites… quand il établissait les fondements de la terre… moi, je grandissais à ses côtés ».

Le Psalmiste peut ainsi proclamer que le Nom de Dieu est « grand par toute la terre », car la création tout entière le proclame.

Saint Paul nous dit ensuite que l’amour de Dieu n’est pas resté dans le monde d’En-Haut, mais qu’il « a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné ».

Même notre prière concerne la Sainte Trinité. Bien sûr, il est légitime, selon les circonstances, de contempler et de prier tour à tour telle Personne de la Trinité plutôt que telle autre. Mais il nous faut toujours nous souvenir que lorsque nous prions l’une des trois Personnes divines, c’est vers la Sainte Trinité que nous nous tournons en appropriant à l’une des Personnes des caractères qui appartiennent en réalité à Dieu dans son unité : Amour, Vérité, Sagesse, etc. 

Lorsque l’une des Personnes est présente, les deux autres sont présentes aussi.

Nous prions toujours le Père, par le Fils, dans l’Esprit Saint ; ou bien le Fils, uni au Père dans l’Esprit Saint ; ou bien l’Esprit Saint, qui est l’Esprit du Père et du Fils.

Si l’Esprit Saint est répandu sur les Apôtres, c’est pour ensuite se déverser par surabondance sur toute l’Eglise et sur le monde afin que ce monde reconnaisse Dieu dans sa Vérité. C’est ce que nous dit Jésus dans l’Evangile : « Quand il viendra, Lui, l’Esprit de Vérité, il vous conduira vers la Vérité tout entière ».

Ainsi l’histoire des hommes est tout entière conduite et marquée du sceau et de la présence de la Sainte Trinité.

Toute l’histoire de la Bible, qui est l’histoire de l’humanité relue à la lumière de la foi, est là pour nous rappeler son œuvre – cette œuvre que l’on appelle « l’histoire sainte ».

Depuis l’origine du monde jusqu’à la fin des temps, Dieu suscite et maintien dans l’être le monde – ce monde qui est le nôtre –, lui donne l’existence, vient le peupler avec des hommes et des femmes capables de le connaître et de l’aimer ; puis, à travers l’histoire d’Israël, il se manifeste pour leur faire comprendre sa présence et son œuvre : il se révèle peu à peu jusqu’à venir Lui-même en Personne par le Fils dans l’Incarnation, afin de nous révéler en plénitude son visage.

En ces temps qui sont les derniers et qui sont les nôtres, il est là pour partager notre condition humaine ; pas seulement pour donner la vie en général ou envoyer des messages pour faire comprendre les événements ; mais il habite corporellement, dans toute la plénitude de sa divinité, dans son Corps qui est l’Eglise. C’est Dieu lui-même, Dieu né de Dieu, Lumière né de la Lumière, vrai Dieu né du vrai Dieu, qui est là, en particulier et au plus haut point dans l’Eucharistie que nous recevons.

La messe est par excellence le lieu de la présence de la Sainte Trinité ; la messe n’est pas notre œuvre : c’est l’œuvre de Dieu. Le Christ actualise, en un lieu et en un temps donnés, l’offrande éternelle qu’il fait au Père dans l’Esprit Saint. Et il nous entraîne sacramentellement dans son offrande afin que nous soyons nous-mêmes transformés en Lui pour devenir participants de la nature divine. Voilà la messe : le Christ qui s’offre au Père dans l’Esprit Saint et nous entraîne dans son offrande. 

Cette présence et cette action de la Trinité, nous les trouvons bien sûr au cœur de tous les autres sacrements mais aussi dans la prière, quand, dans le secret de notre cœur, nous essayons de nous tourner vers Dieu et de lui confier nos joies, nos peines, nos souffrances, nos attentes et tous ceux que nous portons. Dans la profondeur de ce cœur-à-cœur avec Dieu, la Sainte Trinité se rend présente par l’Esprit Saint, cet Esprit Saint qui nous a été donné et qui a répandu dans nos cœurs l’amour de Dieu.

C’est là, dans le secret de la prière, que nous approfondissons notre connaissance et notre amour de Dieu, dans l’Esprit de Vérité qui, peu à peu, nous conduit vers la Vérité tout entière. Loin de tout misérabilisme chagrin, loin de tout esprit de peur, de jugement, de récrimination, de révolte ou de résignation, rendons grâce dans la joie en ce jour pour l’œuvre de la Sainte Trinité dans le monde, dans l’Eglise et dans nos propres vies.

Ô Trinité bienheureuse, nous t’adorons et nous te rendons grâce pour ton œuvre merveilleuse ! Sois bénie éternellement ! 

Amen !

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