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Pater Laurentius Blog Homélies et digressions d'un prêtre catholique français sur l'Eglise, la géopolitique, la Russie et quelques autres marottes.

Homélie du 1er dimanche de l'Avent, Année C - 28 novembre 2021

Pater Laurentius

« Redressez-vous et relevez la tête, car votre rédemption approche »

   Voici donc que nous entrons dans le temps de l’Avent. Le temps de l’Avent est un temps d’attente de la venue du Seigneur, et ceci de deux manières.
   D’une part, c’est un temps de préparation au mystère de Noël. Les textes et toute l’atmosphère de cette période nous portent à une plus grande proximité, à une plus grande intimité avec les membres de la Sainte Famille, la Vierge Marie et saint Joseph, pour vivre avec eux ce temps de veille, d’attente du petit enfant de la crèche.
Durant ce temps de l’Avent – c’est la tradition –, on installe à la maison une crèche qui va accueillir tour à tour les différentes figures du récit de la Nativité, depuis l’âne et le bœuf jusqu’aux mages venus d’Orient, et qui bien sûr, la nuit de Noël, accueillera l’Enfant-Jésus. Une crèche, cela dit beaucoup. Peu importe qu’elle soit sophistiquée ou bien toute simple : la crèche manifeste dans l’intimité du foyer la réalité inouïe que nous fêtons à Noël : Dieu s’est fait homme. « Le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous » (Jn 1,14).
   Et puis il y a une autre attente qui est en réalité la principale, celle pour laquelle il nous est demandé de veiller, de nous préparer chacun personnellement : c’est l’attente de la Parousie, du retour glorieux du Christ à la fin des temps, l’attente de la venue du Christ en gloire. Le mystère de Noël lui-même nous oriente vers cette seconde Venue. Bien plus qu’un anniversaire, une célébration touchante de l’enfance ou l’occasion d’une fête de famille, la célébration de la Nativité est là d’abord pour nous dire que Dieu est venu dans notre chair, non pas pour y rester, mais pour nous entraîner avec lui dans la participation de sa nature divine. « Dieu s’est fait homme pour que l’homme devienne Dieu », dit saint Athanase. C'est tout le projet de Dieu : nous faire entrer dans la participation à la vie divine, dans sa gloire. 
   Les textes d’aujourd’hui nous le rappellent : « Voici venir des jours – oracle du Seigneur – où j’accomplirai la parole de Bonheur que j’ai adressée à la Maison d’Israël », dit le Seigneur par la bouche du prophète Jérémie. Et Jésus, dans l’Évangile, dit à ses disciples : « On verra le Fils de l’Homme venir dans les nuées avec grande puissance et grande gloire ».
   Cette nouvelle année liturgique commence ainsi comme s’est achevée l’année liturgique qui vient de prendre fin : sous le signe de l’annonce des temps eschatologiques.


   En même temps qu’il parle de sa venue dans la gloire, Jésus a aussi, dans l’évangile d’aujourd’hui, des paroles terribles : « Il y aura des signes dans le soleil, la lune et les étoiles ; sur terre, les nations seront affolées et désemparées par le fracas de la mer et des flots. Les hommes mourront de peur dans l’attente de ce qui doit arriver au monde, car les puissances des cieux seront ébranlées. »
   Nous n’avons pas beaucoup à chercher pour rencontrer autour de nous les signes dont parle l’Évangile. Peut-être sommes-nous moins sensibles aujourd’hui aux signes cosmiques que l’étaient les générations passées ; mais pour ce qui est de l’esprit de peur, il semble que nous ne soyons pas en reste. 
   Aujourd’hui sur la terre, les nations sont affolées, les hommes sont saisis de crainte, moins à cause du fracas de la mer et de la tempête que par peur d’être contaminés par un virus – qui n’est pourtant pas celui de la peste noire ! –. Partout se multiplient depuis maintenant plus d’un an et demi – bientôt deux ans ! – les discours de peur, les alertes, les mises en gardes infantilisantes, les restrictions en tous genres, y compris aux libertés les plus élémentaires comme celle de se déplacer, de se réunir, et même de travailler. Une sorte de sidération s’est emparée des foules. La peur en effet paralyse. 
   En arrière-plan de cette sorte de mystique de la peur, qu’y-a-t-il ? En réalité, à supposer que les discours tenus poursuivent bien l’objectif qu’ils énoncent, il semble n’y avoir qu’une seule préoccupation : celle de la vie biologique. Il s’agit de préserver sa vie biologique d’un virus potentiellement – même si en réalité rarement – mortel. Tout, partout, n’est plus envisagé que sous l’angle du risque potentiel, comme si l’objectif était de parvenir au « zéro mort » absolu, permanent. 
   Dans ce contexte, il n'est peut-être pas inutile de rappeler que chaque année, en France, en temps normal, meurent 600 000 à 620 000 personnes, soient entre 1650 et 1700 morts par jour – de cancers, de maladies cardio-vasculaires, d'accidents, de suicides, etc., ou tout simplement de vieillesse (on ne compte pas ici les 220 000 avortements annuels) – sans que cela, jusqu’ici, n’ait ému personne. Et pour cause : dans le même temps, il y a chaque année un nombre supérieur de naissances. Cela s’appelle la vie.
 

   Dans l’Évangile, face au chaos du monde, le Christ ne propose pas la voie de la peur. Quand il voit les hommes mourir de peur dans la crainte des malheurs arrivant sur le monde, il ne dit pas à ses disciples d’avoir encore plus peur qu’eux. Il leur dit au contraire: « redressez-vous, relevez la tête, car votre rédemption approche ! »
C’est pour apporter, au milieu des malheurs et des peurs qui frappent et saisissent le monde, la lumière de l’espérance, que le Christ vient. Même au milieu des ténèbres – et spécialement au milieu des ténèbres – nous sommes appelés, en tant que chrétiens, à lire les événements à la lumière de la foi. Nous sommes invités à nous redresser et à relever la tête, car notre Rédempteur est proche.
   Même si les ténèbres devaient recouvrir toute la terre comme à l’heure où le Christ est mort en Croix, il nous faudrait entrer dans ce temps de l’Avent en suivant la lumière de Bethléem, c’est-à-dire en nous unissant à la Vierge Marie et à saint Joseph en chemin vers l’humble grotte de la Nativité. C’est ce chemin qui s’ouvre devant nous pour ce temps de l’Avent. Non pas un chemin de peur, mais un chemin d’espérance, de foi, d’humilité. Ce chemin nous conduira d’abord, au soir de Noël, à venir adorer le Nouveau-Né de la crèche ; puis, le jour venu, c’est ce même chemin qui nous donnera, avec la grâce de Dieu, de paraître debout devant le Fils de l’Homme.
   Durant ces quatre semaines qui s’ouvrent aujourd’hui, nous sommes appelés à veiller et prier. Et sur ce chemin de Bethléem, nous pourrons redire encore et encore ces paroles tirées du livre d’Isaïe et reprises dans cette hymne magnifique du Rorate : 

« Rorate caeli desuper et nubes pluant Iustum.
   Aperiatur terra et germinet Salvatorem ! » (Is 45,8 – Vulg.) 

« Cieux, répandez votre rosée et que les nuées fassent pleuvoir le Juste.
 Que la terre s’ouvre et qu’elle enfante le Sauveur ! »

Amen !

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